Voici ce que tout bédule ayant voté pour Freysinger
devrait se graver dans sa cervelle de petite linotte :
Ces années sanglantes où la Suisse faillit éclater
sous la menace du II ième Reich
Depuis quelques jours, on voit toute l’extrême
droite de ce bout de pays courir à la rescousse d’un conseiller d’état valaisan
pris la main dans le pot de miel. Quelques personnes naïves s’y laissent
prendre et entonnent le refrain : « laissons-le faire ses preuves, pourquoi
tant de haine, ce n’est qu’un drapeau anodin après tout ». Quelques petits
malins enfoncent le clou en prétendant donner des leçons d’histoire pleines de
morgue… Et enduites d’erreur : « le IIème Reich n’était pas le
IIIème, bandes d’incultes, faut pas tout confondre ».
Non, faut pas confondre. Ni tenter de berner le
lecteur trop confiant. Parce que ce drapeau innocent a bel et bien été aussi celui du IIIème
Reich à ses débuts, durant deux ans. Puis il est resté celui de la
Kriegsmarine, pendant toute la guerre. Or le Monsieur qui porte une queue de
cheval dit lui-même l’avoir acheté en visitant un U-boot. Par ailleurs il est
professeur d’Allemand. Censé être informé de l’histoire de ce pays et du sien.
En principe.
C’est là que le bât rentre carrément dans la chair
de l’âne. Parce que ce drapeau fut effectivement d’abord celui du IIème Reich,
de l’unité allemande (contre la joyeuse pagaille décentralisée qui précédait),
de Bismarck et de la guerre de 14-18. Durant laquelle la Suisse passa à deux
doigts de l’éclatement. 7 000 Français de Genève sont morts dans les tranchées,
mais aussi des milliers de Suisses. Après l’invasion de la Belgique neutre,
plusieurs dizaines de milliers de Confédérés s’étaient engagés dans la Légion
étrangère où ils se sont battus héroïquement contre l’hégémonie allemande,
faisant du 1er Régiment Etranger le plus décoré de France. Parmi
eux, un Neuchâtelois d’origine alémanique, Blaise Cendrars, qui y perdit un
bras. Il n'est pas faux d'écrire que leur participation fut décisive et qu'en
aidant la France, ils sauvèrent la Confédération d'une annexion pure et simple
dans le IIème Reich.
Pendant ce temps en effet, un autre Neuchâtelois,
Conrad Ulrich Wille, avait été élu général, commandant en chef de l’Armée
Suisse, avec le soutien appuyé des 235 000 allemands résidant en Suisse
orientale (dont l’ancêtre de Blocher), contre 68 000 français, presque tous à
Genève. Né à Berlin dans une famille de collaborateurs du Roi de Prusse, Wille
est marié à une comtesse von Bismarck, cousine du chancelier. Il va tout faire
pour engager la Confédération aux côtés des Allemands, échouant de justesse à
plusieurs reprises. Il masse ses troupes aux frontières françaises et
italiennes et laisse le Rhin quasi sans défense, alors que les Prussiens ont
envahi la France en violant la neutralité belge. Ses officiers supérieurs
fournissent à leurs homologues allemands les codes de l’armée russe (et écopent
gentiment de quinze jours d’arrêt…), il contribue au départ de Lénine, et
surtout à au moins deux reprises, prépare des plans d’invasion de la France,
stoppés in extremis par le Conseil Fédéral, qu’il insulte copieusement dans ses
courriers privés.
J’oubliais: le KronPrinz Guillaume est le parrain
de son petit-fils. Conrad Ulrich est aussi le grand-père maternel d’Annemarie
Schwarzenbach, écrivain morphinomane, amie d’Ella Maillart avec qui elle voyage
en Afghanistan et surtout militante anti-nazie. Tandis que son oncle Ulrich
Sigmund Wille (le père du filleur du Kronprinz) devenu à son tour Colonel
commandant de corps, disputera sa fonction au Général Guisan, avec des
intentions clairement pan-germanistes, voire pro-nazies vu les circonstances,
au point qu’il sera finalement exclu de l’armée en 1942.
Bref, pour un partisan de l’indépendance jalouse du
peuple des bergers contre l’emprise européenne, l’emblème semble mal choisi,
qui fut celui du pan-germanisme ouvertement désireux d’avaler la Suisse, au
moins dans sa partie alémanique.
Sauf bien sûr si c’est bel et bien son adoption comme signe de ralliement par l’extrême-droite nazillone européenne qui motive la présence de l’emblème dans la cave du Conseiller d’Etat valaisan. De même que son apparition à la télévision. L’ultime provoc à destination de ses nombreux fans dans les milieux racistes et identitaires : « Regardez, je suis au Gouvernement, avec ça chez moi. » Pure supputation bien sûr, mais peut—être bien la provoc de trop. A noter que même Marine le Pen ne tolère pas ce genre d’excès et exclut systématiquement tous ceux qui arborent des symboles d’une époque honnie.
Sauf bien sûr si c’est bel et bien son adoption comme signe de ralliement par l’extrême-droite nazillone européenne qui motive la présence de l’emblème dans la cave du Conseiller d’Etat valaisan. De même que son apparition à la télévision. L’ultime provoc à destination de ses nombreux fans dans les milieux racistes et identitaires : « Regardez, je suis au Gouvernement, avec ça chez moi. » Pure supputation bien sûr, mais peut—être bien la provoc de trop. A noter que même Marine le Pen ne tolère pas ce genre d’excès et exclut systématiquement tous ceux qui arborent des symboles d’une époque honnie.
On a donc ainsi officiellement en Suisse une UDC
qui va plus loin que le Pen. Cela n’a rien d’anodin et les cris d’orfraie en
défense du tribun à queue de cheval, réclamant le respect pour l’homme, sa
fonction et ses électeurs, sont nuls et non avenus lorsqu’on voit la violence
avec laquelle les mêmes milieux n’hésitent pas à conspuer les édiles en place,
respectueuses du pacte républicain et du système confédéral. La condamnation en
justice d’un rédacteur en chef valaisan qui avait laissé passer des
rapprochements déplacés sur les origines communes entre le tribun à queue de
cheval et le dernier chancelier du Reich prend soudain un goût amer.
Concrètement, cela n’est pas sans incidence sur nos
prochaines élections cantonales. On sait que le nouveau Conseiller d’Etat
valaisan a toujours été pour un rapprochement entre l’UDC et le MCG. Le soutien
qu’il a reçu des membres de ces deux partis confirme au besoin qu’on est bien
en présence de deux formations d’extrême-droite. Dans les blogs et sur
Facebook, le débat est allé très loin, jusqu’à relativiser les crimes nazis, au
prétexte de la colonisation, ou de la collaboration. Positions indéfendables. Qu’il
existe des tueurs de vieilles dames, par exemple, ne réduit en rien l’ignominie
d’un serial-killer violeur d’enfants… Ni la nécessité de mettre le mal hors
d’état de nuire. Pour cela, le vote pour des formations démocratiques sans
ambiguité apparait une impérieuse nécessité.
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